les deux premières années de Manon
J'ai volontairement choisi de mettre en avant ces deux années car elles ont été les plus dures pour moi... avec le recul et les années qui ont passé, j'ai l'impression d'avoir manqué l'essentiel (profiter de ma fille), tellement la fatigue et la confusion étaient présentes....
Je ne pouvais pas savoir que ce serait aussi éprouvant... mais en même temps, heureusement! Sinon jamais je n'aurais pris mon rôle de maman si à coeur à partir de ce 13 novembre 1996!!! Il valait donc mieux que je sois gonflée à bloc... pour la suite des évènements...
Manon n'a jamais respecté les trois heures d'attente entre chaque biberon... tu parles!!!! J'ai passé des journées et des nuits à me demander si j'allais en finir un jour avec les pleurs, les biberons à répétition qui finissaient en rejet systématique, le sommeil par tranche de 30 minutes dont seule Manon avait le secret... même le silence la réveillait!!! Nous étions parvenus à une décision absurde qui consistait à la faire dormir dans son relax la journée, bien à plat, dans un lange, au beau milieu de la salle à manger!!! Elle semblait y être rassurée, apaisée par nos bruits, notre quotidien: même Julie et sa tendance à chanter toute la journée ne la perturbait pas!!!...
Je suis sûre que le bruit permanent des machines de la néonat devait faire partie de son quotidien... du coup, elle se sentait perdue dans notre appartement si calme... nous avons donc composé avec ce système les deux premiers mois...
Les rejets ont vite mis une pression sur mon moral... je n'avais pas loué le pèse-bébé comme je l'avais fait pour Julie (ce qui me fait bien sourire aujourd'hui, Julie était née à terme avec un poids de 2,92Okgs!!!!), et je flippais quant à la prise de poids de Manon... Tout partait systématiquement sur mes genoux et sur la housse de notre cher fauteuil poang [ikea], qui en reçut des litres de lait!!!! La nuit je m'asseyais sur ce même fauteuil, allumait MTV pour ne pas m'endormir, Manon buvait lentement... l'hiver était là... j'étais en chemise de nuit, le bras endolori par ce petit bébé si raide qui une fois calé ne bougeait plus et m'engourdissait... nous n'avions pas eu le temps de mettre de rideaux à la grande baie vitrée de la salle à manger... en face un immeuble abandonné avait été vite pris d'assaut par des sans-papiers en novembre... chaque nuit je voyais le même jeune homme me regarder donner le biberon depuis la fenêtre d'en face... seule la rue nous séparait... lui devait trouver du réconfort à voir une maman nourrir son bébé, et moi je me disais que j'étais bien chanceuse d'etre au chaud et en famille par rapport à lui, même avec le risque de vomissement qui survenait presque à chaque fois!!.... Donna Lewis entonnait son "I Love you, always, forever" chaque nuit vers 3 heures du mat, les programmations musicales étaient souvent en boucle sur MTV... je chantonnais ces douces paroles à ma petite poussinette qui me regardait fixement en têtant....
La veille de Noël mes parents sont arrivés de Normandie pour passer les fêtes avec nous... j'ai alors confié à ma mère que je trouvais que quelque chose n'allait vraiment pas... Manon était raide, vomisseuse, et elle pleurait quand je la tournais dans son lit ou dans le bain... L'hopital Trousseau tenait à assurer le suivi médical de Manon mais la visite était encore loin... j'avais eu connaissance qu'une pédiatre très compétente officait dans le quartier... et j'ai tenté le coup, le 24 décembre au matin... j'ai déballé mon sac au téléphone et elle m'a demandé de passer de suite... Cette pédiatre ne se souvient certainement plus de moi ni de Manon, mais je suis toujours heureuse de la voir régulièrement à la télévision sur le plateau des Maternelles .... elle m'a beaucoup aidée.... [Je ne me permets pas de citer son nom]
Manon a été vite diagnostiquée : oesophage brûlé par sa prise de cortisone depuis sa sortie de l'hopital (cela servait d'auto-bloquant pour un angiome qu'elle avait sous le pied gauche), le "clapet" de son estomac ne remontait plus à cause de la sonde gastrique qui l'avait pourtant nourri et elle avait un torticolis congénital qui lui bloquait tout le côté gauche....
J'étais rassurée et en même temps furieuse de ne pas avoir vu que ma fille ne tournait la tête que d'un côté... en couveuse, elle était toujours sur même flan, sinon elle regardait le mur... tout s'expliquait....
Nous avons donc tout repris à zéro... Un ostéopathe a manipulé Manon et j'ai vu ma poussinette se délecter de faire enfin des mouvements souples et rotatifs... le sommeil a commencé à être réparateur et nous avons repris un rythme normal... C'était nécessaire car nous étions épuisés... Julie était en forme dès 7H30 le matin et je devais assurer.... Julie faisait sa sieste sans problème en début d'après-midi, mais Manon dormait peu et je ne voulais pas m'allonger à mon tour, même pour ce court laps de temps.... il y avait trop de linge à plier, de ménage à faire, de repas à préparer...
Je pense que j'enviais secrètement Jean-Phi qui partait chaque matin au boulot... nous étions tous les deux postiers, nous avions passé le concours après la fac... je connaissais son quotidien et quand il rentrait le soir pour me parler guichet, clients, comptabilité, je pensais à ma vie d'avant et je me demandais si un jour je redeviendrais celle que j'étais... la fatigue ne partait jamais même après que Manon fasse ses nuits complètes... je n'étais pas épuisée que physiquement, je l'étais moralement...
Je sortais chaque jour faire mon tour de marché rue d'Aligre... c'était une façon de me sentir vivante: ça hurlait, ça grouillait, c'était coloré... Julie avait droit à sa banane quotidienne, nous avions liés amitié avec un vendeur du trottoir d'en face... je pense encore souvent à lui... je suis sûre qu'il est toujours là-bas...
L'après-midi je partais faire la "coulée verte" juste à deux pas de chez moi. J'avais investi dans une poussette double car Julie n'était tout de même pas obligé d'assurer tous les kilomètres que je lui imposais... c'était ma bouffée d'oxygène... cette promenade était un vrai régal... les plantes, le vert, le fait d'être sur-élévés et de ne pas entendre le bruit des voitures... Je croisais de plus en plus les mêmes mamans avec leurs bouts de chou... nous échangions sourires et banalités... c'était peu mais pour moi, c'était le seul côté "social" que ma petite vie de mère au foyer offrait....
Comme toujours, le sujet des mamans tournaient autour de leur progéniture... Julie était sociable, marrante et attirait les commentaires... Manon était plus en retrait et on me disait juste "oh elle n'est pas vieille celle-ci!!!!!"... J'aurais pu et dû mentir... annonçant un "oui, elle a trois mois..." avec un large sourire et passer mon chemin... Mais je ne pouvais pas... Je balançais un tristounet "elle a six mois" et je rentrais dans le récit apocalyptique de sa naissance prématurée, chose que personne n'avait envie d'entendre.... sauf moi... comme pour me l'extirper de mon souvenir à tout jamais... comme pour me soulager d'un poids et d'une culpabilité trop lourds à porter... Je n'étais pas réjouie de voir ma fille évoluer si lentement... je languissais et bouillais intérieurement... J'avais trop de repères avec Julie, trop de souvenirs encore récents d'une maternité épanouïe, d'une petite fille blonde aux yeux bleus qui nous a comblé de bonheur... de par sa présence, son caractère, son affection grandissante... Manon était là sans vraiment l'être... trop sage...J'avais une fonction restreinte de mère nourricière et je n'avais pas d'échanges affectifs, d'étincelle dans son regard si bleu.... Je ne voulais pas l'avouer mais j'étais inquiète, assez torturée... chaque mois était une étape au niveau taille et poids, Manon n'attirait pas l'attention particulière des médecins mais moi je cogitais... tout le temps... et ce fut le début d'une longue traversée du désert...
Cet été là nous sommes partis dans le Sud Ouest chez ma belle famille et dans les Pyrénées... avec les 4 grands parents... Nous avions loué une grande maison de village à quelques kilomètres de Luchon... c'était rustique mais j'étais heureuse de ne plus arpentée les rues de la capitale, de ne pas rester dans mon appartement si chaud l'été...
Manon s'est sentie bien et a passé un super été... La pédiatre m'avait conseillé d'acheter un trotteur pour la muscler, et la forcer à se mettre debout... elle allait à reculons, se propulsait avec les deux pieds, allant ainsi vers de nouveaux horizons... Julie était ravie et la poussait joyeusement... enfin une complicité naissait... c'était inespéré... je ne sais pas pourquoi, Manon a toujours progressé pendant l'été et en particulier quand nous étions en montagne... (bizarrement, c'est une adoratrice de la montagne aujourd'hui et elle voudrait vivre près de la nature plus tard...)
Côté nourriture, on commençait la diversification, les bledi dej le matin... j'avais acheté un baby cook... mes résolutions de mère au foyer qui fait son maximum ne me quittaient pas... j'avais tellement peur de ne pas être à la hauteur...
Manon mangeait bien, très mixé... Elle prenait des rondeurs, et avait bonne mine...
Ce fut pour moi une période de bonheur familial intense... je me reposais, je déléguais... Manon a acquis la position assise en août, à notre retour... elle souriait, réagissait aux pitreries de sa soeur.. j'avais confiance pour l'hiver à venir...
L'hiver en a été autrement... Manon a commencé décembre avec une bronchiolite, de la kiné respiratoire... la bécotide et la ventoline sont devenues nécessaires... Elle essayait de se tenir debout contre les petites tables de salon, le canapé... mais c'était raide, maladroit... la pédiatre me demanda de voir une psychomotricienne. J'ai pris rendez-vous de suite près de chez moi, confiante. La séance s'est faite sans moi... je regardais de loin, de la salle d'attente. Manon est restée assise 15 mns en face de la jeune femme qui empilait des cerceaux sur un petit manche en bois... Manon ne coopérait pas, assise, la bouche ouverte, pétrifiée... La jeune psychomotricienne est venue me voir, les mains dans les poches, et m'a dit "bon bah elle est assez inactive, je pense que vous devriez la stimuler, elle en a besoin. Je vous propose de la revoir la semaine prochaine, on referra une séance de jeux... le fait d'empiler, de structurer, c'est important. En attendant... euh, c'est 300 francs..."
J'étais consciente que Manon avait besoin de stimulation, je ne remettais pas cette parole en doute... j'avais également conscience que 300 francs non remboursés deux ou trois fois par mois était au dessus de mes moyens....nous avions eu une année difficile financièrement.... Je suis donc rentrée chez moi abattue, énervée... je me sentais nulle de ne pas avoir envie de jouer avec Manon comme l'avait fait cette jeune femme... car ce n'était pas faute d'avoir essayé... ce n'était pas comme avec Julie, rien ne "sortait" d'elle... c'était platonique, à sens unique...
Manon semblait détester qu'on l'oblige à farfouiller dans sa caisse à jouets, et comprenait encore moins qu'on s'asseoit en face d'elle et lui tende dix mille trucs bruyants et encombrants... j'avais vite admis son manque d'intérêt et avait fini par déclarer forfait...
Je ne suis donc jamais retournée voir la psychomotricienne... je n'en suis pas fière... Je me laisse dire que mon moral psychologique et financier ont pris la décision pour moi....
Manon a abordé le printemps 98 avec un caractère pleurnichard, coléreux et tyrannique... On ne pouvait pas la contraindre à faire quelque chose qui sortait de l'ordinaire... Il suffisait que je me trompe de biberon le matin pour déclencher une crise: pour elle, il devait être jaune; ou que je lui change de dessin animé pour faire plaisir à Julie qui en avait marre de voir toujours le même (car Manon regardait toujours la même chose, des dizaines de fois de suite, inlassablement)... tout était prétexte à colère et prise de tête... je m'accrochais avec elle. Je jouais le jeu de la maman ferme qui ne revenait pas sur sa décision et qui n'allait pas se laisser faire... Le problème est qu'à ce "jeu" elle fut plus forte que moi....
Manon ne cédait pas et entrait dans des colères noires qui me desarmaient de plus en plus... j'en arrivais à redouter de sortir manger chez nos amis. Manon ne supportait plus d'être en dehors de chez elle... elle ne mangeait que mixé et je n'avais pas envie d'être jugée par l'entourage... je ne disais rien quand le steak frites arrivait...je laissais Manon s'adapter, Julie en avait été capable, pourquoi pas elle?... pourquoi ne la comprennais-je pas? Toujours est-il que l'incapacité de Manon à affronter le moindre imprévu a commencé à se révéler... et à nous pourrir la vie.
Les rituels ont ponctué de plus en plus son quotidien. Elle menait une vie réglée et ne voulait pas qu'on la sorte de ce cocon -ridicule à nos yeux- qu'elle tissait autour d'elle... Je passais mes journées à essayer de lui faire prendre des "risques" : changer de dessin animé le matin, changer l'heure du bain, manger des morceaux, accepter de sortir en poussette dans la foule sans se crisper et hurler dès qu'une voisine osait lui dire bonjour...
Je ne sais plus à force... c'était pourtant, il me semble, trois fois rien, mais si important à ses yeux...
Elle s'énervait après Julie qui était pourtant bonne poire : elle lui apportait tout ce qu'elle voulait. De mon côté je l'obligeais à faire un effort, à se lever, à marcher, même à quatre pattes, rien n'y faisait... Nous étions en conflit permanent. je passais mes journées à la pousser dans ses retranchements... Jean-Phi rentrait le soir et j'étais épuisée, aux bords de larmes... j'avais l'impression de mener un combat chaque jour contre une tête de mûle qui n'était pas démonstrative... Je n'avais aucun calin de sa part et quand je la suppliais de m'expliquer ce qui n'allait pas, de n'importe quelle façon, un "non" de la tête, un "aïe" pour me faire comprendre que ce que je lui demandais était douloureux, un "oui" de consentement... rien ne venait jamais, hormis des pleurs, des cris... Je commençais à pleurer le soir dans mon lit quand elle était couchée... Je l'aimais pourtant si fort... C'était insupportable de passer des journées entières à être en conflit avec elle... je n'arrêtais pas de dire à Jean-Phi que ce n'était pas normal, que j'avais l'impression de ne pas avoir la notice qui allait avec cette petite poupée si mystérieuse... Je ne réussissais rien de bien avec elle. Nous n'avions pas de moments de joie suffisants pour nous en rappeler. Seules les crises marquaient nos esprits, notre relation...
Je me suis confiée à une amie très proche qui me connaissait depuis longtemps... J'ai commencé par lui dire que Manon n'était pas normale, que je sentais au fond de moi qu'elle n'était pas comme les autres... Ma peur de la prendre en grippe me hantait et je m'aperçevais que je me levais le matin avec une boule dans le ventre... je ne pouvais plus assumer un quotidien pareil...
Manon écoutait... je parlais de cela sans même m'apercevoir qu'elle était toujours à deux pas de moi... je ne sais pas pourquoi j'ai manqué de vigilance à ce sujet...
je l'explique juste par le fait qu'elle était comme "éteinte" pour moi... ce qui revenait à dire qu'elle ne faisait pas attention à moi, à mes pleurs, à mes paroles de desespoir déversées à des inconnus sur son compte... elle était invisible pour moi, inexistante... au niveau de la compréhension bien sûr... j'ai commis une énorme erreur en pensant une telle absurdité... Manon a toujours su que je pleurais à cause d'elle, que je m'inquiétais pour elle, que je racontais en boucle sa naissance et que je commençais à regretter d'avoir eu un deuxième enfant... elle n'a jamais montré le moindre intérêt, elle a toujours fait comme si de rien n'était...
J'ai longtemps eu du mal à me pardonner la façon avec laquelle j'ai agi à cette époque... Manon a dû souffrir atrocement d'être l'éternel "sujet qui perturbe" la famille, d'entendre sa mère dire avec desespoir à quiconque croisait son chemin qu'elle n'arriverait à rien avec son caractère... que c'était une coléreuse, une tyrannique et qu'elle prenait volontairement son temps pour marcher comme pour m'empoisonner la vie...
Je le dis et l'affirme aujourd'hui : Manon ne pouvait pas se construire avec une telle négation de ma part, une telle intolérance...
Sa colère était justifiée : elle ne pouvait pas faire autrement... elle souffrait et hurlait sa douleur... elle était enfermée dans un corps mollasson et coincé... son mental était très fort, très doué... mais totalement en décalage avec son physique...
Elle attendait mon aide mais je n'ai pas interprété cela comme de l'impatience et de la souffrance de sa part... mais comme des caprices purs et simples.
L'entourage au sens large du terme n'a pas aidé à me convaincre du contraire. Manon était sortie d'affaire pour tout le monde, sauf pour moi qui vivait avec elle chaque jour. Je me plaignais aujourd'hui de son caractère difficile mais j'avais plus ou moins récolté les fruits de mon attitude de mère couveuse, sur-protectrice et étouffante... On ne me le reprochait pas, on savait trop que j'avais risqué de la perdre...on trouvait juste que cette petite avait su tirer bénéfice de sa "naissance"... et en faisait voir de toutes les couleurs à ses pauvres parents...
Je ne disais rien, j'acceptais cette analyse... car entrer dans le débat qui consistait à faire admettre que quelque chose "clochait" chez cette enfant était peine perdue... les très proches refusaient d'entendre, quand on commençait à prononcer des mots comme "séquelle", "autisme" ou "handicap"... je n'avais personne à qui me confier et trouver écho...
Jean-phi restait optimiste: toujours ses "on verra bien plus tard, faut attendre"... attendre, patienter... pas pour moi, plus pour moi...
Fin juin 1998 je suis retournée voir un ostéopathe. Un ami était venu nous présenter sa future femme à la maison. Elle était kiné. Elle s'est permis de me dire que ma fille ne pourrait jamais marcher avec une telle position des pieds... et que sur son conseil, je devrais aller voir ce fameux ostéopathe, en plus à deux pas de chez nous, de sa part... c'était, d'après elle, un faiseur de miracles...
Je n'avais plus rien à perdre. J'étais en phase de renonciation et de préparation au handicap. Le médecin que j'avais vu en visite à Trousseau m'avait dit que si elle ne marchait pas après cet été, il faudrait penser à envisager des séquelles lourdes..; j'avais le moral dans les chaussettes... j'étais en colère contre le monde entier, contre la fatalité, contre moi qui avait mis au monde cette petite fille dans cet état...
La séance fut longue et surprenante. Un profil de Manon a été dressé : caractère, peurs, fragilité, goûts culinaires... Il était calme et très posé. J'étais très impressionnée. Il a manipulé Manon et a même réussi à en apprendre plus sur elle que j'avais bien voulu lui en dire, rien qu'en la touchant... j'étais bluffée.
Il m'a prescrit une dose unique d'homéopathie à lui donner le soir-même et m'a recommandé de lui donner du pyrogenium en cas de fièvre et du lycopodium en cas d'état fébrile... Puis il m'a serré la main et m'a dit la plus belle phrase qu'un "médecin" puisse me dire : "elle va marcher dans le mois qui suit"... nous étions fin juin...
En juillet nous sommes partis en vacances en Ardèche chez des amis très proches. Nous avons passé des moments formidables, Manon était pleine d'entrain et prenait des risques... elle avait toujours ses pleurs avant de s'endormir. Elle ne connaissait pas cette maison et détestait son lit parapluie. Mais je réussissais à ne pas me mettre trop en boule contre elle... et je n'entrais pas dans son jeu...
Le 12 juillet 1998, nous étions en train de nous préparer à regarder la finale de la coupe du monde, comme tout le monde... Nous étions dans l'appartement de nos amis, en plein Aubenas, sous les toits... il faisait chaud. nous avions passé l'après-midi à la piscine. Nous étions joyeux, affamés et nous étions devant un coca à bavarder de tout et de rien... Manon est alors arrivée vers nous en marchant... Mon amie, Loulou, a crié: "Véro, regarde Manon: elle marche toute seule!!!!"... j'étais sans voix... Manon riait aux éclats et recommençait l'exploit en levant les bras au ciel dès qu'elle s'arrêtait... elle s'immobilisait pour faire son demi tour et hop, elle repartait... je me suis mise à pleurer de bonheur, de soulagement... Laurence m'a prise dans ses bras... Jean-Phi était euphorique et cela a augmenté avec le résultat du match!!! La France était champion du monde de football.... Ce soir là, les klaxons ont chanté toute la nuit dans les rues d'Aubenas... je n'ai pas fermé l'oeil une seule fois... Cet élan de joie dû à la victoire était vraiment bien tombé cette nuit-là... ce fut la plus belle nuit depuis la naissance de Manon....